Une analyse du marché français du biofioul en chauffage individuel, par Grant

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Champs de colza servant à la production de biofioul

Comment se positionne le biofioul sur le marché du chauffage individuel en France ? Quel est l’avenir de cette énergie alternative au fioul ? Grant, fabricant de solutions de chauffage à énergies renouvelables dont des chaudières biofioul, livre une analyse factuelle de ce biocombustible, pour en finir avec les a priori et mieux comprendre les évolutions possibles.

Le biofioul, qu’est-ce que c’est ?

Depuis le 1er juillet 2022, la loi française oblige d’installer une chaudière neuve compatible biofioul. Le biofioul a été créé pour répondre à cette nouvelle réglementation. Il s’agit d’un biocombustible liquide de chauffage, autrement dit une énergie renouvelable au sens de la directive de l’Union européenne. Il est immédiatement substituable au fioul 100% d’origine fossile.
Il est composé de fioul domestique et d’ester méthylique de colza (EMC) de colza. Le biofioul F30, sur le marché depuis deux ans, contient 30% de colza et 70% de fioul. L’EMC, en tant qu’énergie renouvelable, permet de réduire significativement les émissions de CO2. Il répond aux exigences du plafond d’émissions de CO2 fixé par le ministère de la Transition Ecologique à compter du 1er juillet 2022, à savoir moins de 300 g CO2eq/kWh PCI.

Pourquoi ajouter du colza au fioul domestique ?

Le choix du colza pour créer un bioliquide de chauffage a été privilégié en raison des nombreux avantages du colza en tant que plante et de son dérivé estérifié en tant que biocombustible.
Le colza est une plante mellifère, à l’origine de 40% du miel produit en France (source Fédération française des producteurs d’oléagineux et protéagineux – Fop), disponible en quantité suffisante sans concurrence avec l’alimentation humaine.

En tant que biocombustible, l’EMC offre :

  • Une capacité de production sous-employée à l’heure actuelle ;
  • Une bonne tenue au froid (jusqu’à -17°C) et une bonne stabilité de stockage ;
  • Un potentiel de réduction des gaz à effet de serre de 50 à 70% par rapport au fioul domestique.

Les évolutions du biofioul vers le 100% renouvelable

L’objectif de la filière est de déployer un biofioul 100% renouvelable d’ici 2040. « La prochaine étape est de passer au biofioul F55 (55% de colza) en 2027 », explique David Foissy, ambassadeur Biofioul Grand Est pour la CPE Bardout (filiale de Totalenergies dans le Grand Est).

Une production française prometteuse

La France est un des premiers producteurs de colza en Europe avec l’Allemagne. 5 millions de tonnes de colza ont été produits en France en 2018 par 80 000 agriculteurs, dont 1,8 millions de tonnes étaient destinés à la production d’EMC (source ministère de l’Agriculture et Fop).
Le choix du colza comme biocombustible repose sur une ressource suffisante sous-employée. La capacité de production d’EMC pourrait passer à 2,4 millions de tonnes avec des sites d’estérification mieux exploités.

Passer du fioul au biofioul simplement ?

Le biofioul peut être utilisé en remplacement du fioul domestique sur une chaudière classique déjà en place, moyennant à minima le changement du brûleur et le nettoyage de la cuve de fioul, et le cas échéant l’adaptation de la ligne d’alimentation et le remplacement de la cuve de fioul. Le biofioul est aussi complètement adapté aux nouvelles chaudières biocompatibles.

État des lieux du marché du chauffage fioul et biofioul en France

Qui consomme du fioul ?

Le fioul est la troisième énergie de chauffage en France, selon la FF3C (syndicat national des distributeurs de combustibles). Cette énergie fossile est encore à ce jour utilisée comme énergie de chauffage par plus de 3 millions de maisons individuelles et 500 000 logements collectifs en France, soit environ 10 millions de français et 9,6% de l’ensemble des logements en 2020 (source SDES).

Les utilisateurs de fioul sont majoritairement situés dans des territoires ruraux, dans des zones non desservies par le gaz de ville. Le Grand Est, les Hauts-de-France et l’Auvergne-Rhône-Alpes, sont les régions les plus concernées, avec des températures hivernales basses qui nécessitent des équipements de chauffage adaptés. Les pompes à chaleur (PAC), par exemple, demandent des appels de puissance importants en cas de températures très basses.

Les consommateurs sont-ils prêts à passer au biofioul ?

Selon l’étude réalisée par Audirep pour la FF3C en octobre 2023 auprès de 1 000 utilisateurs de fioul domestique en maison individuelle :

  • 9 utilisateurs sur 10 sont attachés au fioul qu’ils jugent efficace, confortable et facilement stockable.
  • 69% des utilisateurs de fioul domestique jugent leur énergie de chauffage plus polluante que les autres.
  • 47% des répondants se disent prêts à adapter dès maintenant leur chaudière pour pouvoir utiliser du biofioul F30 (changement de brûleur).
  • 57% des répondants sont prêts à changer de matériel de chauffage et à opter pour des matériels « Biofioul F100 ready » pour pouvoir utiliser, à terme, du F100, bioliquide 100% renouvelable.

Il y a donc un avenir pour les chaudières biofioul en France, avec des utilisateurs prêts à faire le pas.

Un réseau de distribution en hausse

1 200 entreprises vendent du fioul domestique et 360 établissements distribuent du biofioul sur l’ensemble du territoire français auprès des consommateurs finaux (source FF3C, octobre 2024). Le réseau compte 18 dépôts primaires qui alimentent les établissements de distribution.
Le développement du réseau de distribution du biofioul est un élément essentiel pour permettre le déploiement de cette solution biocombustible. Le maillage s’intensifie progressivement.
L’objectif est de permettre aux consommateurs d’avoir un point de livraison à moins de 50 km de chez eux partout en France, selon la FF3C.

Les ventes de biofioul en progression

Les ventes de biofioul F30 progressent avec un volume national de 60 000 m³ en septembre 2024, contre 8 000 m³ en 2023. Cette forte croissance s’explique par la hausse des ventes de chaudières biofioul (+17% en 2024, source FF3C) et par un prix satisfaisant, vendu quasiment à prix coûtant par les distributeurs pour gagner en compétitivité : « Le prix de vente actuel du Biofioul F30 est de 1,38 €/L TTC contre 1,28 €/L TTC pour du Fioul Premier, soit un coût d’environ 15 centimes/kWh de plus que le fioul domestique. Cet écart de prix entre les deux produits est acceptable », confirme David Foissy.

La hausse du volume national est aussi dû aux adaptations volontaires des consommateurs ayant une chaudière fioul traditionnelle. En effet, moyennant des modifications techniques mineures, à savoir le changement du brûleur, une chaudière fioul traditionnelle peut fonctionner avec du biofioul.

Et les aides de l’état, dans tout ça ?

Aujourd’hui, le biofioul ne profite d’aucune aide des pouvoirs publics. La filière souhaite la mise en place d’une fiscalité adaptée. Il faut savoir que le biofioul est taxé à la même hauteur que le fioul domestique. Et il n’existe pas d’aides financières pour l’installation d’une chaudière biofioul ou pour l’adaptation d’une chaudière fioul en biofioul.
« Le combustible liquide pour sa part est littéralement passé sous silence. Le texte sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ne cite ni le fioul domestique ni son substitut. Seul le texte de stratégie nationale bas carbone (SNBC) évoque une trajectoire pour obtenir une réduction de 75% des équipements fioul domestique dans 6 ans. Une réduction de 75% de l’activité, des emplois, pénitence renforcée par une baisse significative des volumes de carburants et un plafonnement du bois énergie », regrette Frédéric Plan, délégué général FF3C, en octobre 2024.